Avec l’arrivée d’Halloween, je me suis dis qu’il n’y avait rien de mieux que de vous conter Bordeaux de manière insolite. Légendes liées à l’Histoire ou bien à des faits surnaturels, vous trouverez ici des histoires faites pour vous faire frissonner. D’ailleurs si vous ne savez toujours pas ce que vous faîtes pour Halloween, je vous conseille de lire cet article. [Lien : Halloween 2019 : Que faire à Bordeaux ?]

Quand l’Histoire est faiseuse d’histoires

LE RÉCLUSOIR DE LA CHAPELLE SAINT LAZARE

C’est au Moyen Age, à l’angle des rues Judaïque et du Palais-Gallien, qu’on pouvait apercevoir la Chapelle Saint-Ladre (aussi appelée Saint-Lazare) et son réclusoir (cellule où se trouvaient les reclus(es)).

A l’époque, chaque grande ville possédait un(e) reclus(e). Cependant, au 13ème siècle, Bordeaux en comptait 3. La recluse ou le reclus était une personne, de nature pauvre et/ou veuf(ve). Elle acceptait de vivre séquestrée dans une cellule étriquée et n’en sortait qu’une fois sa mort arrivée. L’objectif de cette personne était de prier Dieu pour protéger la ville des guerres, famines et épidémies. Les habitants de l’époque voyaient le(la) reclus(e) comme une protection surnaturelle. Insolite, dirait-on aujourd’hui ! Les conditions de vie de cette fameuse personne étaient insoutenables : une loge très étroite où elle devait supporter le froid et l’humidité et où, en plus, elle disposait de nourriture seulement si quelqu’un souhaitait lui en amener. La pauvre personne enfermée s’infligeait donc une lente torture solitaire, où la détention d’une foi profonde était alors plus que nécessaire.

En 1452, le Comte anglais John Talbot a fait détruire La Chapelle et son réclusoir lors du siège de la Ville.

LA PLACE GAMBETTA, ANCIENNE PLACE DES GUILLOTINÉS

La première guillotine de Bordeaux s’est installée le 23 octobre 1793 sur l’ancienne Place Nationale (actuelle Place Gambetta). Pendant une durée de 10 mois elle fonctionna et offra donc un spectacle sanglant et quasi quotidien aux bordelais. Ce sont environ 300 personnes qui se sont faites décapitées : riches, pauvres, laïcs, religieux, nobles, députés, citoyens ordinaires… Toutes les catégories sociales y sont passées.

Elle fut déplacée à la fin du 18ème siècle sur la Place extérieure des Salinières (actuelle Place de Bir Hakeim) pour exécuter les droits communs. Cependant, les travaux de construction du Pont de Pierre rendent les exécutions impossibles. C’est finalement, la Place d’Aquitaine (Place de la Victoire) qui l’accueilla en 1806.

En 1840, la condamnation de Pierre-Vincent Eliçabide, auteur d’un triple meurtre, attire près de 40 000 personnes. En 1875, la proclamation du décret Crémieux fait disparaître le côté « spectacle » du châtiment. On déplaça alors la guillotine Place du repos (aujourd’hui Place Gaviniès). Cette place fut choisie parce qu’elle était proche du Fort du Hâ, où sont emprisonnés les condamnés, mais aussi du cimetière de la Chartreuse.

La dernière exécution publique à Bordeaux eu lieu le 23 novembre 1933. Ce qui est relativement proche de nous, assez insolite et impensable comme méthode de punition de nos jours. Elle concernait un agriculteur qui avait tué 6 personnes de sa famille.

LE CIMETIÈRE DE LA CHARTREUSE

Avec 29 hectares, ce cimetière, laïc, est le plus grand de France après celui du Père Lachaise. Certes, dans la journée, vous pourrez arpenter ses immenses allées dans une atmosphère paisible. Cependant seuls les plus courageux s’y aventurent la nuit. En effet le fameux cimetière serait bercé de fantômes et de cris nocturnes. Si vous souhaitez vous y balader à la tombée de la nuit, attendez vous à avoir peur. Dans un premier temps, vous serez accueilli par un immense portail, légèrement austère… Puis vous ne tarderez pas à tomber face à l’impressionnante statue de la Grande Faucheuse, avec ses yeux creux et son allure terrifiante vous risquez de vous enfuir !

Pour ceux qui décident de continuer, vous rencontrerez les tombes de quelques célébrités, Goya, Delacroix (le père), Flora Tristan… Mais également des tombes plus étonnantes d’origine chinoise ou musulmane entourée de vignes et d’oliviers. Enfin, vous trouverez le fameux mausolée des musiciens, imaginé par un mécène, pour accueillir les artistes avec gloire et sans le sou.

LA PLACE FERNAND LAFARGUE : PLACE DES TORTURES

Au 12ème siècle, sur l’actuelle Place Fernand Lafargue se dressait le pilori où l’on exposait les condamnés. Les exécutions capitales avaient lieu devant le palais de l’Ombrière (Place du Palais) où le gibet et le bûcher étaient bien en place.

Le bourreau, appelé aussi le pendard, était une personne à la fois crainte et respectée par tous. Il était en charge de l’exécution des peines et de l’inspection des lieux de prostitution. Le bourreau gagnait sa vie en récoltant l’argent qu’on lui jetait à terre lors de l’exécution des peines. Son salaire variait donc en fonction des supplices infligés :

  • le voleur : les oreilles coupées
  • l’empoisonneur, l’hérétique et la sorcière : brûlés vifs
  • le blasphémateur : la langue percée
  • le faux-monnayeur : bouilli vif
  • le mendiant qui fait du mal à un enfant : traîné dans la ville par un cheval
  • les amants adultérins : corps marqué au fer rouge
  • le meurtrier : enterré vif avec sa victime
  • la prostituée tenant de mauvais propos : amende de dix sols, si elle ne payait pas, on la plongeait trois fois dans l’eau de la Garonne : on « baignait la maquerelle« 

Cependant, du fait que l’exécution des peines était un véritable « spectacle », plutôt insolite je vous l’accorde, le peuple devait être satisfait. Si il considérait que le supplice infligé n’avait pas été bien réalisé, ou avait été réalisé trop vite, le bourreau était exécuté sur place par son successeur.

L’Insolite mêlé aux légendes urbaines

LA LÉGENDE INSOLITE DU PALAIS GALLIEN

Le Palais Gallien est l’unique vestige encore visible de l’antique ville gallo-romaine, Burdigala (Bordeaux). Il s’agissait d’un amphithéâtre romain, construit au 2ème siècle, où se déroulaient des combats de fauves et de gladiateurs, rien de bien insolite pour le moment.

La légende raconte que le Palais Gallien était le lieu de rendez-vous des sorciers et sorcières qui volaient dans les airs pour s’y rendre la nuit sous un fort orage. La cérémonie en question s’appelait le Sabbat, elle serait présidée par le Diable, représenté par un bouc. Au cours de ces nuits, ils adoraient le Démon et reniaient donc la foi chrétienne. Les sorciers et sorcières s’enduisaient le corps d’un « onguent » (pommade) fait de chair de jeunes enfants sacrifiaient rituellement. Pendant toute la cérémonie, les sorcières fabriquaient des poisons censés donner la mort aux gens et aux cultures.

Le Sabbat se terminait par une « orgie » générale où les sorciers s’accouplaient avec les démons succubes (« celles qui se couchent dessous ») et les sorcières avec les démons incubes (« ceux qui se couchent dessus »). S’en suivait alors un grand festin où les jeunes enfants sacrifiés étaient dévorés.

De plus, à l’époque, les sorciers et sorcières se transformaient en loups-garou pour attaquer les troupeaux de bêtes et humains. Mais si ils étaient blessés, ils gardaient leur blessure même en reprenant forme humaine. C’est grâce à ça que le peuple parvenait à les reconnaître.

Du Moyen-Age jusqu’à la Révolution (où on le transforma en carrière publique), les ruines du Palais Gallien ont une mauvaise réputation. Les truands et les prostituées s’y rassemblaient pour organiser des duels et des courses de taureaux.

LE DRAGON DE LA VIEILLE TOUR

Au 14ème siècle, il y avait dans la rue du Canon (aujourd’hui rue de la Vieille Tour), une tour qui détenait en son sommet un canon servant à annoncer le couvre-feu ou l’arrivée d’un ennemi. Mais un jour un dragon monstrueux s’empara de la tour. Il dévorait les enfants et menaçait les bordelais de souffler la peste ou le choléra si on ne lui apportait pas tous les dimanches un jeune homme ou une jeune fille de 15 à 20 ans, ainsi qu’une panière de légumes et des herbes aromatiques. Par peur et pour protéger leur ville, les habitants exécutèrent le souhait du dragon pendant plusieurs mois.

Mais un jour, on désigna Nicolette, une jolie et intelligente jeune fille, pour entrer dans la Tour du Dragon. Elle réussit à parler au dragon et à garder la vie sauve en lui promettant de lui apporter le meilleur vin et la meilleure nourriture de Bordeaux. Elle découvrit alors que le dragon n’avait peur de rien sauf d’une chose : la crosse de Saint-Martial. Ce dernier est un bâton doté de pouvoirs miraculeux, que le Pape Saint-Pierre avait remis à Martial pour convertir l’Aquitaine. Il était gardait depuis des années dans la Cathédrale de Limoges.

Nicolette attendit que le dragon ait bu du vin pour jeter une brique en bas de la tour où elle avait écris, en langue Gascogne, avec son sang « Aperats ajuda ! Lo fort de sen martial, et la besti maufadenta gurpira. » En français, cela voudrait dire, « Appelez à l’aide ! La creuse de Saint-Marial et la bête malfaisante s’en ira. »

On envoya douze magistrats municipaux de Bordeaux à Limoges pour négocier l’emprunt du fameux bâton de Saint Martial. Six d’entre eux furent retenus en otage pour garantir l’emprunt et le bâton de Saint Martial arriva enfin à Bordeaux. Dès que le bâton toucha la tour, le dragon effrayé pris la fuite et sauta dans la Garonne où une pluie de flamme l’englouti pour toujours.

Pour finir, les bordelais ayant eu connaissance des autres pouvoirs magiques de la Crosse de Saint Martial, notamment de sa capacité à faire venir la pluie, décidèrent de garder la relique. Ils trompèrent donc les limousins puisque les otages en question n’étaient que des hommes sans mérite, payés pour cette mission.

« HOUSES OF PARLIAMENT » : LE PUB BORDELAIS INSOLITE

Ouvert depuis 2003, « Houses Of Parliament » est un pub anglais qui se situe au cœur du vieux Bordeaux. Certains employés parlent d’apparitions étranges se déroulant dès la fermeture du bar. On verrait apparaître, une femme habillée de vêtements violet dans un miroir et un homme endormi dans le sofa de la salle de billard, mais dès qu’un employé arrive, ils se volatilisent. On raconte également que les caisses de bouteilles et les chaises se déplacent toutes seules. Ces phénomènes pourraient provenir de l’ancienneté du bâtiment puisque certaines parties du pub aurait plus de 300 ans.

LE FANTÔME DE LA CATHÉDRALE SAINT ANDRÉ

Devant le portail de la Cathédrale Saint André, un soir d’été, une cycliste percuta violemment un homme en soutane blanche. Lorsqu’elle se releva et se retourna pour aborder l’homme, ce dernier s’était volatilisé. Un froid glacial aurait traversé la cycliste lorqu’elle percuta cet homme, elle est persuadée d’avoir eu affaire d’un fantôme. Plusieurs témoins affirment également avoir vu un homme, ressemblant à un moine, errer devant la Cathédrale.

De plus, des SDF racontent qu’à cet endroit, leurs chiens devenaient fous et aboyer constamment, sans raison, jour et nuit.

L’INSOLITE LOUP-GAROU DE LA RUE DE L’OBSERVANCE

En mai 1603, on retrouva plusieurs enfants blessés, tués, et même mangés par une « bête » ressemblant à un loup. Jean Grenier d’Aquitaine, garçon de 14 ans, se vante d’être l’auteur de ces horreurs et d’être un loup-garou. Selon lui, il tiendrait son pouvoir d’une peau de loup grâce à laquelle il se transforme lorsqu’il la porte.

La justice rattrapa Jean rapidement et le condamna à la pendaison, l’étranglement puis à la brulure. Cependant, les médecins pensaient simplement que Jean était un idiot et un mythomane. On le fit alors enfermer jusqu’à sa mort dans le couvent des Cordeliers (rue de l’Observance) pour qu’il reçoive une meilleure éducation. On considérait alors Jean comme une attraction, une bête de foire que les habitants se hâtaient de voir pour se moquer.

Le juge de Bordeaux, Pierre de Lancre, lui rendit visite pour juger son comportement et évaluer quelconque évolution. Il établi alors dans son rapport que le jeune homme était très squelettique, qu’il ne se déplaçait qu’à quatre pattes, qu’il hurlait comme un loup et enfin qu’il refusait de se nourrir normalement, préférant dévorer les ordures trainant sur le sol. De plus, ses ongles étaient recourbés semblables à des griffes et ses dents étaient longues et acérées. Jean resta convaincu qu’il était un loup garou jusqu’à sa mort en 1610.

LE CHÂTEAU DU DIABLE À CENON

Cette imposante bâtisse a tout du château hanté. En effet, elle se situe sur le haut d’une colline et se compose d’une grande façade, de fenêtres sous les combles, d’un escalier envahi par le lierre et de sous-sols condamnés. Les habitants surnomment ce bâtiment « le château du diable ». Des rumeurs circulent sur des esprits qui hanteraient les lieux depuis plusieurs dizaines d’années. Le château fût dans un premier temps la demeure du maire, puis la propriété de viticulteurs ou encore un restaurant. De manière plus normale, on l’appelle Château Voisin Ville, Château Dorios ou De Rios, mais son nom de château « diabolique » reste le plus connu.

Aujourd’hui, il héberge le Centre d’information et d’orientation de Cenon. Les ouvriers qui se sont occupés de la rénovation du bâtiment, on mis en garde les employés sur la présence d’esprits. Cependant, personne n’a jamais rien entendu ou vu quelque chose de paranormal. Ces rumeurs remontent à 1938, le château était alors à l’abandon et marginaux ainsi qu’hors-la-loi en avait fait leur squat. Les habitants ont donc décidé d’inventer, de toute pièce, une histoire insolite et terrifiante autour du château pour éviter à leurs enfants de mauvaises rencontres en leur contant que le diable résidait à l’intérieur.

J’espère que toutes ces histoires vous ont plus et ont réussi à vous angoisser un petit peu avant l’arrivée d’Halloween. On apprécie souvent les contes et légendes liés à l’histoire ou à l’insolite lors des soirées à thème « horreur », d’autant plus lorsqu’ils concernent la ville où l’on se trouve ! Alors, surtout n’hésitez pas à les raconter à vos amis ou à votre famille afin de créer une ambiance encore plus terrifiante… Cet article insolite vous a plu et vous souhaitez connaître encore plus d’histoires sur Bordeaux ? Rendez-vous dans la librairie bordelaise Mollat pour vous procurer le livre suivant. [Lien : Livre « Contes et légendes du Vieux Bordeaux »]